Isabelle Talbert-Paris est sophrologueCaycédienne à Meudon (92),diplômée de Sophrologie à l’Académie de Sophrologie de Paris 15ème, Coach en neuro-sciences motivationnelles, membre du Comité Pédagogique de l’Académie de Sophrologie de Paris, Professeur à l’Académie de Sophrologie de Paris 15ème.
EGMOS : En quelques mots, qu’est-ce que la sophrologie ?
Isabelle Talbert-Paris : La Sophrologie a été créée en 1960 par le Professeur Alfonso Caycedo (neuropsychiatre). C’est, à la fois une science qui étudie la conscience, un art de vivre à la recherche d’une harmonie physique et mentale et une philosophie existentielle qui permet à chaque individu de rechercher et développer les valeurs propres de son existence. Les sources de la Sophrologie sont notamment : le yoga, le zen, le bouddhisme, la relaxation, la méditation, la philosophie phénoménologique, la respiration, l’activation du positif, la neurologie…
C’est une méthode d’activation de la conscience utilisant le corps, la respiration et l’esprit. Elle aide à développer les valeurs et capacités qui permettent de faire face aux événements de l’existence.
EGMOS : Pouvez-vous nous décrire le déroulement d’une séance de sophrologie ?
Isabelle Talbert-Paris : La Sophrologie Caycédienne peut être pratiquée individuellement ou en groupe, dans un contexte professionnel, personnel ou bien de développement personnel.
Une séance de sophrologie, quel que soit l’exercice concerné, permet de se poser, de se consacrer un instant de pause, d’apaiser sa respiration, de se ressourcer, de se recentrer et de se concentrer.
Une séance de Sophrologie Caycédienne comporte les séquences suivantes :
- Partie théorique : présentation de l’objectif et du déroulement de l’exercice
- Pratique de l’exercice, en position assise ou debout (position allongée en cas d’impossibilité à maintenir les autres positions).
- Expression de la nature et la qualification des sensations qui se manifestent.
- Echanges, questions/réponses.
L’exercice de sophrologie comporte en introduction une partie dite de sophronisation permettant de se centrer sur soi, puis un exercice de libération des tensions, douleurs et pensées parasites et enfin un exercice de prise de conscience de l’énergie vitale au niveau organique. Ensuite, se déroule la partie d’activation de la conscience pour mettre en place, par exemple, un outil de centrage sur soi, de gestion du sommeil, de substitution d’une sensation agréable (chaleur par exemple) à une sensation désagréable (douleur), de préparation positive à un examen ou une intervention chirurgicale…. Puis l’exercice se termine par une pause d’accueil des sensations, l’activation de la confiance, de l’harmonie physique et mentale et de la capacité de projet et d’espoir, puis la remobilisation d’une respiration plus dynamique et enfin du corps par le mouvement.
EGMOS : Qu’est-ce qui différencie la sophrologie de la relaxation ?
Isabelle Talbert-Paris : La Sophrologie va au-delà de la relaxation, c’est une méthode de connaissance de soi et de développement personnel, dont le champ d’application est très vaste. Elle comporte un entraînement qui peut permettre à chacun de prendre conscience de son corps et de son esprit, de sa respiration, de ses capacités et de ses valeurs. Elle permet de vivre plus positivement et de gérer son stress, ses émotions et ses capacités.
La sophrologie utilise uniquement la prise de conscience du relâchement du corps (issue de la relaxation) pour accéder au niveau de conscience situé entre veille et sommeil, dit sophro-liminal, permettant la pratique de tous les exercices de sophrologie.
EGMOS : Peut-on dire que la sophrologie est une activité thérapeutique ?
Isabelle Talbert-Paris : La sophrologie complète efficacement les traitements allopathiques et la médicine traditionnelle mais ne saurait s’y substituer. Elle peut faciliter l’acceptation des traitements, voire éventuellement en augmenter les effets. Toutefois, elle ne s’attache pas à la cause des maux mais aux symptômes et à la manière dont ils sont vécus, par conséquent on ne peut pas dire que ce soit une activité uniquement thérapeutique. Toutefois, elle est souvent recommandée par les médecins en complément de traitements allopathiques et pratiquée à l’hôpital.
EGMOS : Permet-elle d’aborder plus sereinement des soins douloureux, ou une intervention que l’on appréhende ?
Isabelle Talbert-Paris : La sophrologie permet d’activer le positif en soi et avec l’entrainement sur des exercices adaptés, notamment avec la futurisation d’événements anxiogènes que l’on se voit en train de vivre sereinement et dans la maîtrise. Elle permet ainsi de se préparer efficacement à des soins douloureux en activant des ressources positives et agréables en soi ou d’aborder sereinement une intervention chirurgicale non pas en la subissant mais en étant acteur et décideur de sa propre santé. Elle est très utilisée par exemple en accompagnement à l’accouchement dans la douceur et le calme tant pour la maman, le bébé que le papa…
EGMOS : Intervenez-vous parfois en milieu hospitalier ? En quoi la pratique de la sophrologie dans ce contexte diffère-elle d’une activité en cabinet ou en entreprise ?
Isabelle Talbert-Paris : Personnellement je n’interviens pas en milieu hospitalier. Il m’est seulement arrivé de proposer des formations sur les bases de la sophrologie à des personnels soignants et des séances de sophrologie en groupe à des équipes médicales sur leur lieu de travail. Mais certains sophrologues interviennent en effet à l’hôpital où les besoins sont nombreux.
En entreprise, des ateliers hebdomadaires de groupe de Sophrologie Caycédienne et de Relaxation Dynamique Caycédienne (RDC) permettent la pratique régulière d’exercices de mise en place et d’entretien de bien-être et de détente, dans une ambiance calme, bienveillante et sympathique. Les groupes de RDC permettent à ceux qui les suivent de développer complètement et progressivement en eux les différentes potentialités de la Sophrologie Caycédienne dans un but de développement personnel et/ou professionnel.
Dans ce contexte, la pratique hebdomadaire de la Sophrologie permet de gérer son stress, de se centrer, de se mobiliser sur ses capacités et d’intégrer des exercices et outils de gestion du stress et des émotions. Les bienfaits de la pratique permettent à chacun de vivre plus positivement et de développer sa confiance en soi, sans se laisser atteindre par un environnement parfois anxiogène.
EGMOS : Quels seraient les bénéfices pour des patients hospitalisés en greffe de moelle osseuse ?
Isabelle Talbert-Paris : Une séance de sophrologie, quel que soit l’exercice concerné, permet de se consacrer un instant de pause, d’apaiser sa respiration, de se ressourcer, de se recentrer et de se concentrer. L’hospitalisation des patients en raison d’une greffe de moelle osseuse étant longue et comportant des traitements lourds, la sophrologie peut les aider à activer du positif en eux pendant cette période.
La pratique régulière des séances permet de se centrer sur soi et de prendre du recul par rapport à une situation qui peut être anxiogène. Les outils positifs de sophrologie ainsi mis en place avec l’entrainement régulier peuvent être utilisés par le patient lorsque des soins délicats ou douloureux lui sont prodigués. En outre, les ressources mobilisées par les patients à l’occasion des séances leur sont personnelles ; cela permet d’activer des éléments positifs en soi pour faire face et aborder le temps consacré à l’hospitalisation avec plus de patience et de sérénité.
EGMOS : On dit que la sophrologie peut être un outil contre la douleur. Par quel mécanisme ?
Isabelle Talbert-Paris : La sophrologie agit globalement sur la douleur et des protocoles sophrologiques permettent s’induire la sédation. La sophrologie permettant d’activer du positif dans le champ de conscience et de se focaliser sur des sensations agréables. Sa pratique provoque la sécrétion d’endorphines qui permettent de faire face différemment aux douleurs aigües ou rebelles. Certaines séances permettent de ne pas se focaliser sur la douleur (douleur chronique ou aigüe, pendant un soin) en détournant l’attention par exemple sur des évocations senso-perceptives agréables choisies par le sophronisant. Il est en effet nécessaire, pour un niveau de stimulation identique, de ne pas focaliser son attention vers la douleur dont l’intensité perçue augmenterait alors, ainsi que le niveau de désagrément. Au contraire, l’attention dirigée ailleurs que sur la stimulation douloureuse atténue l’intensité de celle-ci.
En sophrologie, il est aussi possible notamment de : revitaliser la partie en souffrance, de communiquer effectivement avec son corps (induire la régression de la zone malade ou douloureuse), d’activer la possibilité et la capacité de récupération, de se programmer durablement à la sédation, de se préparer aux soins et/ou traitements douloureux, de neutraliser les phénomènes émotionnels….
EGMOS : Lorsque les greffés quittent l’hôpital, ils peuvent se sentir transformés et avoir du mal à retrouver leur condition physique, leur vie et leur sérénité antérieure à la maladie. La sophrologie peut être un bon accompagnement durant cette phase de réadaptation ?
Isabelle Talbert-Paris : La sophrologie est aussi une méthode existentielle qui permet de se projeter positivement dans l’existence en s’acceptant avec bienveillance et respect, tel que l’on est. Elle permet, avec la pratique très régulière d’exercices dédiés, d’accepter son nouveau schéma corporel et de se projeter avec celui-ci dans un futur certes modifié mais permettant d’accomplir de nouveaux projets et d’activer sa capacité d’espoir.
La sophrologie peut donc effectivement très utilement accompagner une phase de réadaptation du greffé à sa vie sociale dans toutes ses composantes, en favorisant l’acceptation de nouvelles conditions avec sérénité et activation d’une harmonie entre corps et esprit.