Étude réalisée par Clara Daltin dans le cadre de la spécialité Droit et grands enjeux du monde contemporain du Baccalauréat littéraire au Lycée La Bruyère à Versailles, juin 2017
Introduction
Cet article porte sur le don d’organes, plus particulièrement sur le don d’organes en vue d’une greffe. Tout d’abord, il convient de garder à l’esprit la définition d’un organe : c’est un ensemble de tissus spécifiques capable de remplir une ou plusieurs fonctions déterminée(s). Le corps humain possède 78 organes regroupés en 11 systèmes ; si certains sont nécessaires pour vivre en bonne santé, plusieurs sont indispensables à la vie comme le cerveau, le cœur, les poumons, la moelle osseuse, les reins, le foie et le pancréas. La loi distingue les organes des tissus : peau, os, cornée, etc. Ainsi, comme tous les sujets en rapport avec la santé, les progrès de la science vis-à-vis de la médecine peuvent modifier la vision que nous avons du don d’organes en élargissant les possibilités et les perspectives de prélèvement et de transplantation ; la législation portant sur le don d’organes est donc amenée à se modifier au fur et à mesure de ces avancées scientifiques. Dès lors, il peut être intéressant de nous demander comment la législation au sujet du don d’organes évolue et quels sont ses enjeux. Pour répondre à cette question, nous étudierons tout d’abord la législation en vigueur ; ensuite, nous présenterons les acteurs œuvrant pour le don d’organes. Enfin, nous soulignerons les différents débats existant autour du don d’organes.
La législation en vigueur
Jusqu’à la loi de 2004 incluse
La législation en vigueur sur le don d’organes ne s’est pas élaborée en une seule fois mais est le résultat de plusieurs lois qui se sont succédé afin de combler les vides juridiques engendrés par les progrès en matière de prélèvement et de transplantation d’organes. Nous allons étudier les principales lois qui attestent de l’évolution de la législation.
Loi Caillavet du 22 décembre 1976
Cette loi importante permet de fixer un cadre juridique au don d’organe. Elle est la première à autoriser le don d’organe ante-mortem, à la fois pour les donneurs disposant de leur capacité juridique mais aussi pour les mineurs de la même fratrie que le receveur, sur accord du représentant légal et d’un comité d’experts. La loi autorise un plus grand nombre d’organes pouvant être prélevés à la fois lors d’un prélèvement ante-mortem ou post-mortem en ayant une visée générale et non sur un organe particulier : ainsi, la loi n’entraîne pas de restrictions dans le futur car elle peut rester actuelle en s’adaptant aux avancées scientifiques qui permettent de greffer de plus en plus d’organes. De plus, la loi mentionne certains des principes généraux régissant le don et l’utilisation des éléments et des produits du corps humain qui seront détaillés explicitement dans les lois de bioéthique du 29 juillet 1994 : le consentement du donneur et la gratuité de ce don. Cependant, tous les articles de cette loi ont été abrogés le 30 juillet 1994, date coïncidant avec les lois de bioéthique du 29 juillet 1994 dont certains articles remplacent ceux de la loi Caillavet en précisant les modalités de prélèvement.
Lois de bioéthique du 29 juillet 1994
Cette loi permet de définir distinctement les principes généraux encadrant le don d’organe et les activités gravitant autour des éléments suivants :
Le consentement : Les articles L.655-11, L.671-3, L,671-7 et L,671-8 précisent la législation en matière de consentement pour les donneurs vivants ou décédés : pour les mineurs et les majeurs vivants ne disposant pas de leur capacité juridique, toute forme de prélèvement d’organe est interdite, excepté pour réaliser une greffe de moelle osseuse au sein d’une fratrie. Dans le cas d’un décès, les titulaires de l’autorité parentale ou le représentant légal doivent stipuler leur consentement par écrit. Pour ce qui est des personnes vivantes disposant de leur pleine capacité juridique, leur consentement doit être exprimé au tribunal de grande instance devant le président du tribunal ou un magistrat. Quant aux personnes décédées, leur consentement est admis sauf s’ils ont signifié leur refus sur le registre national. Néanmoins, les médecins sont invités à recueillir le témoignage de la famille afin de savoir si la personne décédée n’aurait pas exprimé son refus sans avoir pris connaissance de l’existence d’un registre prévu à cet effet. De plus, le consentement ou le refus exprimé est révocable à tout moment. Enfin, tout consentement ne peut se faire que dans un but thérapeutique ou scientifique.
La gratuité : Les articles L.665-13 et L.671-13 précisent clairement qu’aucune rémunération ne peut être versée, aussi bien aux praticiens effectuant les prélèvements d’organes qu’au donneur.
L’anonymat : L’article L.665-14 stipule qu’aucune information permettant l’identification du receveur ou du donneur ne peut être divulguée, préservant ainsi l’anonymat entre les deux personnes. De plus, les médecins chargés d’une part du prélèvement et d’autre part de la transplantation doivent faire partie d’unités distinctes afin de préserver l’anonymat. Cependant, ce principe ne peut être respecté que dans le cas d’un prélèvement sur une personne décédée, car le prélèvement sur personne vivante se fait dans le but de bénéficier à une personne en particulier et de ce fait exclut toute forme d’anonymat.
Cette loi fournit également d’autres informations et précisions : Tout d’abord, le prélèvement sur personne vivante ne peut se faire que si le receveur fait partie de la famille proche du donneur (parent, enfant ou frère/sœur) ou est le conjoint de ce dernier. De plus, les médecins chargés du prélèvement post-mortem doivent restaurer le corps du mieux possible.
L’interdiction de publicité: L’article L.665-12 fait la différence entre la publicité pour un don au profit d’une personne ou d’un organisme désigné, interdite, et l’information du public dans un but de sensibilisation sur le don d’organe, encouragée et mise en œuvre par le ministre de la santé.
La sécurité sanitaire: L’article L.665-15 précise que des mesures doivent être prises pour assurer le bon fonctionnement des activités gravitant autour du don d’organe, par l’intermédiaire de dépistage et de règles de sécurité sanitaire.
La biovigilance: L’article L.665-15 peut être considéré comme la première trace dans le droit de la biovigilance, même si ce principe est identifié en 2004 ; pour l’instant, l’article précise seulement qu’il est tenu de respecter une vigilance sur les produits et les dispositifs médicaux pouvant intervenir dans le cadre du don d’organe, mais également sur les informations devant être transmises par les personnes habilité
Loi relative à la bioéthique du 6 août 2004
Cette loi reformule surtout des articles de la loi précédente. Elle donne aussi quelques précisions, notamment sur le principe d’équité que doivent respecter les activités relatives au don d’organes, de même que sur le champ des donneurs vivants qui est élargi, sur les établissements autorisés à effectuer des prélèvements d’organes, etc.
Présentation des changements actuels et de leurs objectifs
Bien que le nombre de donneurs post et ante-mortem confondus ait doublé (passant de 1164 en 2000 à 2395 en 2015), l’écart se creuse entre ces derniers et le nombre de malades en attente de greffe qui a également doublé (12474 en 2006 à 21378 en 2015), la majorité étant des patients en attente d’un rein (16529 en 2015) qui doivent pour l’instant avoir recours à des mesures contraignantes comme la dialyse. Ce constat alarmant, résultant notamment d’une population de plus en plus vieillissante, fait évoluer la législation vers une présomption de consentement de plus en plus importante dans le cadre de la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016 : à partir du 1er janvier 2017, « le prélèvement d’organes post-mortem peut être pratiqué sur une personne majeure dès lors qu’elle n’a pas fait connaître, de son vivant, son refus d’un tel prélèvement, principalement par l’inscription sur un registre national automatisé prévu à cet effet ». Ainsi, les médecins n’ont plus à recueillir l’avis de la famille sur un éventuel refus au don d’organe, car celle-ci est bien souvent responsable du refus sans que celui-ci ait à voir avec l’avis du défunt : sur 1163 refus en 2015, 738 sont liés à l’opposition de l’entourage du défunt, portant le taux de refus à un tiers et clôturant la procédure sur la phrase « Le contexte n’a pas permis de prélèvement ». Désormais, seul un document écrit et signé attestant des circonstances précises du refus formulé par le défunt peut empêcher le prélèvement d’organes, afin de s’assurer que le refus vient réellement de celui-ci. Cette décision pourrait à terme permettre une augmentation des donneurs, et ainsi faire coïncider le pourcentage de prélèvements (actuellement de l’ordre de 67%) avec celui des Français favorables au don d’organe (79%). En contrepartie, le moyen d’exprimer son refus est facilité depuis le 23 janvier 2017 par l’apparition de démarches informatisées d’inscription au registre des refus, possible jusqu’alors uniquement par le biais d’un formulaire papier. Grâce au décret du 11 août 2016 entrant en vigueur le 1er janvier 2017, il est également possible de nuancer son refus : une personne peut non seulement refuser ou autoriser le prélèvement de certains organes et non d’autres, mais également exprimer son refus ou son autorisation quant à la visée de ce prélèvement, c’est-à-dire pour une greffe réalisée dans le cadre de la recherche scientifique ou d’une autopsie.
Les acteurs œuvrant pour le don d’organes
Le Comité consultatif national d’éthique
Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé a été crée par la loi de bioéthique du 29 juillet 1994. Selon l’article 23, le comité vise à rendre des avis sur des questions éthiques et sociétales en rapport avec l’évolution de nos connaissances sur la médecine et la santé. La loi de bioéthique du 6 août 2004 précise ses membres : selon les articles L.1412-1 et -2, le Comité est une autorité indépendante composée d’un président nommé pour 2 ans renouvelable et de 39 membres nommés pour 4 ans renouvelables une fois, parmi lesquels 5 membres désignés par le Président de la République appartenant aux principaux courants religieux et philosophiques (ceux-ci ont été remplacés très récemment par des psychologues et psychanalystes), 19 membres désignés pour leur intérêt pour les problèmes d’éthique par des ministres et les présidents des deux chambres du Parlement, et 15 membres appartenant au secteur de la recherche désignés par les responsables d’hôpitaux, d’académie ou d’institut relatifs aux sciences comme par exemple l’Académie des sciences ou l’Institut Pasteur. L’article R1412-7 modifié le 28 avril 2005 du code de la santé publique fait également mention d’une section technique composée de 4 membres parmi ceux désignés par les ministres et les présidents du Parlement et 8 membres faisant partie du groupe appartenant au secteur de la recherche. Cette section a son propre président. L’article R1412-7 du code de la santé publique stipule que le comité en son entier doit tenir chaque année une conférence publique afin de rendre compte des problèmes d’éthique actuels dans le domaine des sciences de la vie et de la santé.
L’Agence de la biomédecine
L’Agence de la biomédecine est créée par la loi relative à la bioéthique du 6 août 2004. L’article 2 précise qu’elle remplace l’Etablissement français des greffes et prend en charge toutes ses missions entrant dans le cadre du don d’organes selon les articles L1418-1 et R1418-1 :
- De participer à l’élaboration et à l’application de la réglementation et de règles de bonnes pratiques et de formuler des recommandations pour les activités relevant de sa compétence ;
- De promouvoir le don d’organes ;
- De mettre en œuvre un suivi de l’état de santé des donneurs d’organes afin d’évaluer les conséquences du prélèvement sur la santé des donneurs ;
- D’assurer la gestion de la liste des patients en état de greffe ainsi que du registre associant donneurs vivants et receveurs potentiels, ainsi que l’attribution des greffons, qu’ils aient été prélevés en France ou hors du territoire national ;
- D’élaborer les règles de répartition et d’attribution des greffons en tenant compte du caractère d’urgence que peuvent revêtir certaines indications ;
- La gestion et le fonctionnement du registre national automatisé des refus ;
- L’encadrement et la coordination des activités de prélèvement et de greffe d’organes issus du corps humain, y compris les échanges internationaux dont les greffons font l’objet.
L’Agence de la biomédecine n’est donc pas une instance législative. Sa compétence relève de l’application et de la mise en œuvre de la loi, elle donne néanmoins son avis quant à l’élaboration des lois relatives au don d’organes. Elle détient donc un rôle d’éclairage des pouvoirs publics. En tant qu’opérateur de l’Etat, ses subventions sont publiques.
Des études effectuées par l’Agence de la biomédecine au sein de la population ont révélé que bien qu’elle jouisse, parmi ceux qui la connaissent, d’un statut de référente en matière de don d’organes, son existence n’est que peu connue. Au cours des dernières années, l’Agence a donc travaillé à un développement de sa notoriété, afin de promouvoir une totale transparence avec le grand public sur la législation par l’intermédiaire de campagnes de communication, par son inscription sur les réseaux sociaux et sur YouTube, ainsi que par la refonte de ses sites internet qui comptent désormais plus d’un million de visiteurs par an. Les campagnes ont également de plus en plus de retombée dans les médias et ont de ce fait une plus grande visibilité auprès du grand public : Lors de la Semaine de Mobilisation Nationale pour le Don de Moelle Osseuse qui s’est déroulée du 13 au 19 mars 2017, parmi les personnes interrogées, 54% se souviennent de la campagne contre 38% lors de celle de juillet 2016 et 84% se sentent concernées par le don d’organes.
Les associations
Les associations militant pour le don d’organes sont nombreuses : EGMOS, fondée en 1988 et reconnue d’intérêt général est un exemple en matière de sensibilisation au don de moelle osseuse. Cependant, la plus importante en termes de don d’organes au sens large est France ADOT (fédération des Associations pour le Don d’Organes et de Tissus humains) qui est reconnue d’utilité publique. Ses actions ont eu de nombreuses répercussions comme la rédaction d’une charte internationale du don d’organes signée par 4 pays européens en 1989 et la création d’une carte de donneur en 1970. Actuellement, cette dernière fait débat au sein des associations de par son utilité relative : en effet, si 4% des donneurs post-mortem sont porteurs d’une carte de donneur, celle-ci n’est pas prise en compte en tant que consentement de la part du défunt car elle n’a aucune valeur légale.
Débats autour du don d’organes
Comment la législation est-elle perçue par la population ?
Tout d’abord, nous pouvons constater que la législation en vigueur en matière de don d’organes est perçue plus clairement par la population : en effet, le registre des refus enregistre de plus en plus d’inscriptions, environ 1000 par jour ; si cette hausse peut sembler négative pour l’augmentation du prélèvement d’organes, elle est révélatrice d’une meilleure compréhension du fonctionnement de la loi. Le fait que la moitié de ces inscriptions soient faites par Internet montre que l’avancement de la loi qui a permis la création d’une démarche informatique porte ses fruits et facilite l’expression du refus. De plus, des sondages ont révélé que parmi les personnes interrogées sur la législation du don d’organes, 48% avaient conscience du consentement présumé et étaient capables de l’expliquer.
Cependant, certaines personnes, parmi lesquelles des experts, des médecins mais également des associations, expriment des réserves quant à l’évolution de la législation dans le cadre du renforcement de la présomption de consentement en vigueur depuis le 1er janvier 2017 : en effet, cette « nationalisation des corps » pourrait entraîner la méfiance des familles qui n’ont plus aucune prise sur la situation de leur proche défunt et, de ce fait, une réduction des donneurs, entrainant des conséquences inverses à celles escomptées par la nouvelle loi.
De plus, le don d’organes et les activités qui gravitent autour doivent faire face à plusieurs problèmes en rapport avec le déséquilibre du registre des donneurs potentiels dans le cadre d’un prélèvement ante-mortem : en effet, il ne compte que peu d’hommes et de jeunes, ce qui est problématique. Dans le cadre notamment du don de moelle osseuse, les femmes ayant déjà vécu une grossesse développent des anticorps qui augmentent les risques de rejet de leur moelle osseuse par le receveur. Les médecins, en France et à l’international, essayent de ce fait de rééquilibrer le registre des donneurs d’organes potentiels en choisissant majoritairement des donneurs masculins et des donneurs jeunes : aujourd’hui, ils représentent plus de 70% des nouveaux donneurs tous organes confondus. Afin de recruter davantage de donneurs masculins, le don HSH (Hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes) entré en vigueur le 11 juillet 2016 permet aux homosexuels de faire don de leur moelle osseuse.
Des disparités régionales sont également à souligner : certaines régions réalisent plus de greffes d’organes que d’autres, mais cette disparité tend à se résorber grâce aux nouvelles démarches mises en œuvre dans la recherche d’un donneur compatible avec un receveur.
La position des religions monothéistes
Si les trois principales religions monothéistes de France (Le christianisme, l’islam et le judaïsme) sont en faveur du don d’organes, leur discours diffère sur certains points :
La religion chrétienne reconnaît la compétence de la science médicale et les papes ont très tôt et à plusieurs reprises affirmé la nécessité du don d’organe depuis 1956 avec la déclaration du pape Pie XII. Elle autorise le don ante-mortem mais également post-mortem selon les modalités de la loi puisqu’elle reconnaît la mort encéphalique (l’arrêt de toute activité cérébrale).
L’islam autorise le don d’organe ante-mortem et post-mortem selon la Sourate 52 du Coran « Qui sauve une vie sauve l’humanité entière», cependant la mort encéphalique n’est pas admise car cette religion place le cœur au centre de la vie. De ce fait, tant que le cœur de la personne bat elle ne peut être considérée comme morte. L’islam n’autorise donc le prélèvement d’organes post-mortem qu’en cas d’arrêt cardiaque. Un débat existe également sur l’autorisation d’un malade musulman pour recevoir un organe d’une personne non-musulmane : les avis divergent. De ce fait, chaque musulman peut nourrir sa propre opinion sur le sujet. Dans le cas d’un prélèvement post-mortem, l’avis du donneur doit être recueilli ou le cas échéant celui de la famille ou d’une autorité religieuse.
Le judaïsme est favorable au don d’organe ante-mortem, cependant il nourrit des critères similaires à l’islam quant à la définition de la mort dans le cadre d’un prélèvement post-mortem : elle ne peut être reconnue que lors d’une absence totale de mouvement, de respiration et de battements du cœur. Cependant, depuis quelques années, la mort encéphalique est parfois reconnue dans le cas de transplantations cardiaques. De plus, les activités de prélèvements doivent se dérouler dans des conditions précises : un rabbin peut être présent pendant l’intervention si la demande en est faite. Les médecins doivent être non-fumeurs et exclure toute conversation futile durant l’intervention. Enfin, si l’avis du donneur n’a pas été recueilli, les médecins doivent obligatoirement respecter celui de la famille ou le cas échéant d’une autorité rabbinique.
La législation de quelques pays européens
Il est intéressant d’étudier la législation de pays voisins car celle-ci peut avoir une influence sur la nôtre : en effet, une comparaison avec les autres pays européens peut servir d’argument en faveur d’une modification de notre législation. En Allemagne, du fait du principe du consentement explicite qui demande une démarche formelle pour donner ses organes, près de deux fois moins d’organes ont été greffés comparé à la France en 2016 : 3049 contre 5877. De plus, l’Allemagne a fait l’objet de deux scandales au cours des dernières années en raison de manipulation de données. Cela a eu un impact en France avec une hausse de la méfiance et de ce fait une réduction des donneurs.
Au contraire, des pays voisins comme l’Espagne, le Portugal la Belgique, le Luxembourg, adoptent le même principe de consentement présumé que la France. Cependant, les situations divergent : l’Espagne reste un exemple en matière de communications auprès de sa population sur l’intérêt de devenir donneur, contrairement au Luxembourg où malgré l’intensification de campagnes, la population reste réticente et le sujet tabou.
Conclusion
Cette étude nous a permis de constater que si le législateur tend à répondre aux besoins en hausse de la population en matière de greffe en orientant la loi vers une présomption de consentement de plus en plus importante, le problème actuel réside avant tout dans le manque d’éclairage de la législation, qui malgré les efforts des différents acteurs en faveur du don d’organes n’est pas encore assez connue de la part du grand public. De plus, les débats autour de la législation récente montrent que la législation peut influer sur les démarches du don d’organes mais non sur la mentalité de la population. Les acteurs autres que le législateur, tels que les associations, sont donc essentiels afin d’intervenir auprès de celle-ci et l’informer. Il revient également à chaque citoyen de se responsabiliser en abordant le sujet du don d’organes avec ses proches et en cherchant à entreprendre des démarches officielles dans le cas d’un éventuel refus, afin que celui-ci soit réellement pris en compte.
Clara Daltin
Annexes
Loi relative à la bioéthique du 6 août 2004
L’article 16-3 fait la distinction entre le prélèvement d’organe dans l’intérêt thérapeutique de la personne et celui dans l’intérêt thérapeutique d’un receveur. Dans le premier cas, les mineurs ou majeurs sous tutelle peuvent exprimer leur refus vis-à-vis de la possibilité d’utiliser ces organes prélevés.
- L’article L.1231-1 B stipule explicitement le principe d’équité : ainsi, le don d’organe respecte le principe d’équité de la justice, qui ne fait aucune distinction et discrimination.
- L’article L.1231-A instaure le principe de « priorité nationale » : le don d’organe devient officiellement une cause prioritaire et importante pour l’Etat
- L’article L.1231-1 élargit le champs des donneurs vivants possibles : il peut s’agir d’un grand-parent, d’un oncle ou d’une tante, d’un cousin germain ou non, du conjoint d’un de ses parents, ou d’une personne apportant la preuve d’au moins deux ans de vie commune avec le receveur.
- L’article L.1211-6 stipule qu’une intervention ne peut être effectuée sur un potentiel receveur que si les avantages pour celui-ci sont supérieurs aux risques encourus par la greffe.
- Les articles L.1233-1, -3, -4 et L.1235-1 donnent des précisions sur les établissements aptes à procéder aux activités de prélèvement d’organes : une autorisation est accordée en décret par le Conseil d’Etat si l’établissement respecte toutes les conditions sanitaires et médicales, dans lesquelles se trouvent par exemple le respect des principes généraux du don d’organe. L’autorisation ainsi obtenu, valable pendant 5 ans et renouvelable, permet également les activités d’importation et d’exportation des organes à visées thérapeutiques ou scientifiques. Cependant, et dans le but d’accélérer et de faciliter le processus de prélèvement, tous les établissements même non-autorisés sont intégrés dans les réseaux de prélèvement. Enfin, dans les établissements bénéficiant de l’autorisation, un lieu de mémoire est crée afin d’exprimer la reconnaissance des receveurs vis-à-vis des donneurs.
- Les articles L.1231-1 et L.1231-3 définissent le comité d’experts, chargé de se prononcer sur les prélèvements sur personne vivante et d’informer les donneurs. Il se divise en deux formations de cinq membres chacune, nommés pour 5 ans. Selon si la décision concerne un majeur ou un mineur, le comité doit être composé soit d’un médecin et d’un psychologue, soit d’un psychologue spécialisé dans l’enfance et d’un pédiatre.
- Les articles L.1211-3 et L.1232-1 sont en faveur d’une information accrue, d’une part pour les patients de 16 à 25 ans et d’autre part pour les proches du défunt dans le cas d’un prélèvement sur une personne décédée qui doivent être tenu au courant de toute possibilité de prélèvement.
- L’article 1412-6 instaure la création d’espace de réflexion éthique : ce sont des centres d’informations sur le don d’organe, mais également de rassemblement pour des débats sur l’éthique et la santé.
Les instances de l’Agence de la biomédecine
L’Agence de la biomédecine est constituée de trois instances :
- Le conseil d’administration qui a pour charge de délibérer sur les démarches relatives à l’application et à la mise en œuvre des activités de l’Agence : orientations stratégiques, budget, gestion du personnel…
- Le conseil d’orientation qui veille à la cohérence de la politique médicale et scientifique de l’Agence, et fait respecter les principes réglementaires et éthiques dans chacune de ses activités.
- Les conseils médicaux et scientifiques qui coordonnent les travaux scientifiques
L’Agence organise son action autour de grandes orientations stratégiques définies par le COP (Contrat d’Objectif et de Performance) renouvelé tous les 5 ans ; actuellement un nouveau COP vient de succéder à l’ancien pour la période 2017-2021.
Bibliographie
- Légifrance
- France-adot.org : Fédération des Associations pour le Don d’Organes et de Tissus humains
- Article du journal Le Monde du 3 janvier 2017
- Article du journal Le Figaro du 22 juin 2016
- France Info
- collectifdondorganes.org
- sciencesetavenir.fr
- agence-biomedecine.fr
- Journées des associations du jeudi 30 mars 2017 à l’Agence de la Biomédecine en partenariat avec l’association EGMOS